La faute au principal

 

Le 7 mars 1935, le Principal du Collège de Garçons de Verdun, le Collège Buvignier, écrivait :

" L’Elève FLOQUET de la classe de Philosophie a été refusé au Tableau d’Honneur du Mois de Février 1935 et reçoit de la part de l’Assemblée des Professeurs une admonestation pour son esprit de fronde et d’insoumission…

L’Assemblée des Professeurs espère qu’il suffira de cet avertissement pour retrouver en FLOQUET l’élève intelligent et correct qu’elle a connue autrefois."

Ce faisant, il commettait cela que je découvre aujourd’hui, merveilleuse, dans les papiers du Gaston, une faute d’orthographe. De grammaire même. Une faute de frappe peut-être, - à l’instar des autres institutions, l’institution scolaire, on le sait, en commet parfois certaines, et même de plus sévères.

Il eût fallu la corriger, mais non, elle est restée, la faute au Principal.

Et l’Elève FLOQUET ne s’est point amendé. Il ne s’est pas soumis. Frondeur il était, frondeur il est resté. Bientôt, avant même de passer son deuxième bachot, il est parti. A 19 ans, … faire du Théâtre, à Paris… Et puis d’autres choses ailleurs, franc-tireur…

J’ai toujours considéré avec la plus farouche circonspection et fui comme la peste noire les collèges, lycées, sorbonnes, facultés, casernes, champs d’honneur et de bataille... écrivait-il, en janvier 2000. A presque quatre-vingt trois ans. Et il est parti encore, un peu plus d’un an après. Pour de bon cette fois. Pour ne plus revenir. Sacré Gaston ! Des fois qu’on eût pu le penser tout à coup domestique !…

Il a tiré sa révérence, l’gars qui avait dit, dans d’autres peaux, « Merdre » définitivement.

Oh, il serait bien resté encore un peu : il n’avait pas tout fini, et puis il y avait ces gens… mais, que diable !, autre chose l’appelait plus loin. Il ne savait pas exactement quoi, mais s’il l’avait su, n’aurait-il pas trahi sa destinée, celle-là que, soixante-six ans plus tôt, une docte Assemblée eût bien voulu discipliner…

Il est parti sans bagage… pour, là où il est, s’en inventer sans doute.

Peut-il jamais faire autrement ?…

Jean-François Hémery
27 janvier 2002

in memoriam


©Les amis de Gaston Floquet